Peut-être, justement, que le sujet n’avait jamais été réellement débattu avant qu’une décision soit prise, comme nous savons pourtant le faire au sein de notre Scop au fonctionnement parfaitement bordémocratique (un système de notre invention, à la fois bordélique et démocratique). L’ambiance accompagnant l’apparition des réseaux sociaux était un peu la même que celle qui avait accompagné l’avènement du world wide web : il fallait « prendre le train en marche ». Et puis, c’était gratuit, horizontal, ça nous prendrait 5 minutes pour mettre les articles en ligne, ça ne pourrait qu’augmenter notre lectorat – certainement un bon moyen de toucher les jeunes ! –, sans compter que c’était plus écolo que le papier puisque tout était « dématérialisé ». Une fois les articles en ligne, autant les faire connaître au monde entier en les partageant sur les réseaux sociaux, puisque là encore, c’est gratos, et que nous avons tout à gagner à diffuser ainsi notre travail et nos idées.C’est un peu caricatural, car nous avons tout de même eu des discussions et certains désaccords autour de ces questions. Mais au final, avouons-le : sans y plonger la tête la première, nous avons eu tendance à « suivre le mouvement »… Horreur !
Aujourd’hui, nous en revenons. Les promesses d’une « grande démocratisation du monde » grâce au web ont fait long feu. La « dématérialisation » est devenue l’une des industries les plus polluantes. La gestion et la mise à jour d’un site se révèlent beaucoup plus chronophages et laborieuses que prévu. Les réseaux « sociaux » ne sont pas de simples espaces de partage, puisque des algorithmes se chargent d’invisibiliser certains contenus et d’en pousser d’autres, faisant de ces réseaux de redoutables outils de propagande (Trump n’a d’ailleurs pas fini de dire merci à son ami Musk). Par ailleurs, nous savons que l’avenir est à la sobriété, alors que le monde virtuel se présente comme illimité, pouvant stocker des données à l’infini dans le « cloud » – omettant de préciser que ce « nuage » est en réalité constitué de serveurs géants, toujours plus nombreux et consommant toujours plus de matière et d’énergie.
Bref. Au terme d’une multitude de réunions, nous avons acté, bordémocratiquement, que notre avenir ne se trouvait pas sur le net et que nous devions au contraire amorcer notre décroissance numérique. Désinvestir le virtuel pour nous recentrer sur le réel qui, en l’occurrence, prend l’apparence d’un journal papier. Jusqu’où nous mènera ce mouvement ? Nous le verrons. Pour l’heure, nous ne disparaissons pas du web. Une sélection d’articles sera proposée en ligne chaque mois, gratuitement – voire, si le cœur vous en dit, en échange d’un petit don. Par ailleurs, si vous souhaitez continuer à vouloir lire le journal sur un écran (ça finira bien par vous passer !), vous avez toujours la possibilité de vous abonner à sa version PDF. Mais si vous voulez être en avance sur votre temps, abonnez-vous dès maintenant à L’âge de faire… en version papier !
Nicolas Bérard
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