Le froid qui gèle les mains. Abdallah (1) dit que c’est la chose la plus dure à supporter dans son travail. Pour se réchauffer, il a ses stratégies : « Chez Franprix, ils acceptent que tu restes un peu, si tu achètes un jus ou quelque chose à grignoter. Mais quand un collègue me rejoint, ils nous interdisent de nous regrouper. » À la Maison des coursiers de Paris, boulevard Barbès, les rassemblements de livreurs à vélo sont au contraire vivement encouragés. C’est d’ailleurs en participant à une manif pour leurs droits et conditions de travail, qu’Abdallah et beaucoup d’autres ont entendu parler du lieu. « Cette maison, c’est un soulagement pour nous », lâche le jeune homme. Sans rien payer ni avoir de comptes à rendre à qui que ce soit, il peut aller se poser sur les fauteuils orange, boire un café, chauffer sa gamelle, charger son téléphone… et aller aux toilettes.
Ça n’a l’air de rien, mais les WC sont un souci quotidien pour les coursiers, qui ont rarement accès aux sanitaires des commerces pour lesquels ils font des livraisons. « Heureusement qu’il y a les toilettes publiques, remarque Abdallah. Tu peux aussi aller dans les tabacs, si tu prends un café. Et puis, il faut créer un lien avec l’endroit où tu prends tes repas. » Mais ça ne suffit pas toujours. Chercheur en sciences sociales de la santé (lire page suivante), Marwân-al-Qays Bousmah a rencontré le cas d’un livreur diabétique « qui a demandé poliment au client qu’il livrait s’il pouvait aller aux toilettes. Le client a dit non, et l’a signalé à la plateforme ».